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Gouvernance et citoyenneté

Président du CdR - 02.10.2017

« Aucun défi de ce siècle ne trouvera de réponse dans une approche purement nationale »
Le 12 juillet dernier, Karl-Heinz Lambertz a été élu président du Comité européen des régions. Nous l'avons rencontré pour recueillir son opinion sur l’avenir de l’Europe, la future politique de cohésion et les priorités du CdR lors de son mandat.

Quelles sont les priorités de votre mandat ?

Les priorités du Comité européen des régions ont été définies en début de mandat, il y a cinq ans : la relance économique, la dimension territoriale de la législation européenne, une Europe simplifiée, le dialogue avec les citoyens et les relations de l’Europe avec ses frontières constituent nos cinq chantiers de travail. Mais ces priorités devront être en mesure de s’adapter à des évolutions très rapidement.

Personnellement, il y a d’autres enjeux qui m’intéressent très particulièrement : la capacité d’action et d’investissement des collectivités territoriales, la mise place du pilier social européen et la coopération transfrontalière.

La dimension territoriale reste bien entendu parmi vos priorités… 

Tout à fait. Quand on suit l’élaboration des politiques européennes, on remarque très souvent que la dimension territoriale n’est pas suffisamment intégrée dans l’élaboration des politiques. Ce qui fait que parfois nous ne réussissons pas leur mise en oeuvre.

Au CdR, nous avons une double conviction qui domine tout le reste. D'une part, aucun grand enjeu ou défi du XXIe siècle ne trouvera sa réponse uniquement dans une approche nationale, ni dans une approche où chaque Etat joue tout seul dans son coin. D'autre part, nous sommes convaincus que les citoyens n’accepteront l’intégration européenne qu’à condition qu’elle soit perçue comme une valeur ajoutée économique, politique, mais aussi émotionnelle. Et les gens vivront ça là où ils habitent, c’est-à-dire dans les collectivités territoriales.

C’est la raison pour laquelle le CdR continue à se battre pour un approfondissement de l’intégration européenne avec l'implication des collectivités. Elles sont essentielles et doivent jouer un rôle important dans ce processus. 

Votre mandat en tant que président du CdR coïncide avec les débats sur l’avenir de l’Europe et la publication du livre blanc de la Commission européenne. Que vous inspirent ces débats ?
 
Les débats qu’on a eus jusqu’à présent étaient une bonne introduction. Mais ce qu’on attend maintenant c’est une proposition claire de la Commission. 

Par ailleurs, il faudra se poser la question sur qui sera sur la route. Est-ce qu’on fera cela à vingt-sept, à plus de vingt-sept ou à moins ? Est-ce qu’on envisage quelque chose avec les pays de la zone Euro ou seulement une partie de la zone Euro ? 

Nous avons une échéance claire pour répondre à cela : les élections européennes en 2019. Il faut qu’on ait quelque chose de concret avant les élections si on veut éviter que l’euroscepticisme ne devienne encore plus répandu qu’il ne l’est depuis 2014.

L’idée d’une Europe à plusieurs vitesses ne vous inquiète pas ? 

Face à une potentielle Europe à plusieurs vitesses, ce qui m’inquiète c’est cette évidente divergence de vue dans la manière de gérer le devenir financier de l’Europe.

D’un côté, il y a les défenseurs de l’austérité sans limite et ceux qui veulent dégager de véritables flexibilités. D’un autre côté, il y a le clivage qui s’est produit avec les pays de l’Europe de l’Est dans le prolongement de la crise de la migration. Je suis très étonné de voir ce qui se passe dans des pays comme la Pologne ou la Hongrie.

Mais il faut voir pourquoi on est arrivé là et il faut reprendre un dialogue nous permettant de nous rassembler autour d’un certain nombre de valeurs fondamentales clés pour la construction de l’UE.  

Comment le CdR contribue-t-il aux discussions ? 

Il faut bien noter qu’on ne parle pas que de l’avenir de l’UE mais de celui des citoyens. C’est pourquoi j’estime qu’il faut faire participer un maximum de gens à ce débat. 

Au CdR nous avons lancé les « Réflexions sur l’Europe » qui est une initiative permettant aux responsables des collectivités territoriales, à la population et à d’autres acteurs d’exposer leurs préoccupations et leurs idées sur l’avenir de l’Europe. 

Une des étapes clés dans cette réflexion sera l'état des lieux de l’Union par les collectivités locales et régions le 10 octobre. Cet événement se tiendra chaque année dans le cadre de la Semaine européenne des villes et régions. 

Les débats sur l’avenir de la politique de cohésion ont été lancés. Comment se positionne le CdR? 

La politique de cohésion constitue l’ADN de notre institution : les collectivités territoriales et la cohésion sont indissolublement liées. De plus, la politique de cohésion est un des acquis fondamentaux de l’UE, donc il faut pouvoir la poursuivre. Mais cela ne veut pas dire qu’il faut tout continuer comme actuellement. Il faut encore s’adapter, il faut plus de synergie avec les autres politiques, notamment entre la politique agricole et la politique de cohésion.

Quels sont les aspects des débats qui vous inquiètent le plus ?

Il faut une politique de cohésion dans laquelle tout le monde peut jouer un rôle. 

Je suis contre une politique de cohésion qui soutient uniquement les régions les plus pauvres ou les moins développées. Evidemment c’est là où il faut faire les efforts les plus importants, mais la cohésion doit se jouer sur l’ensemble, ce qui veut dire que les régions plus avancées doivent continuer à être partie prenante de cette politique de cohésion globale. 

Par ailleurs, je vois aussi un autre danger lié à la question budgétaire. Certains estiment que pour faire face au départ de la Grande Bretagne et aux nouvelles priorités d’investissements, telles que la sécurité, il faudra faire des coupes budgétaires dans la politique agricole et la politique de cohésion. Il ne faut pas oublier que ce danger est là.

Que pensez-vous de la possibilité d’introduire le principe de conditionnalité dans la future politique de cohésion ? 

Il faut distinguer entre les conditionnalités internes et celles externes, liées aux objectifs du pacte de stabilité, au semestre européen ou aux droits fondamentaux. A ce sujet, notre position est très claire : nous sommes contre. 

Ce qui se passe avec les droits fondamentaux dans certains pays européens est très frustrant. Mais quand on impose une sanction il faut toujours voir si on touche les bonnes cibles. Avec la politique de cohésion, par exemple, on risque de pénaliser ceux qui finalement n’ont pas contribué au problème mais qui, au contraire, seraient des victimes. De plus, on donnerait aux cyniques et populistes le pouvoir et les arguments pour dire que l’Europe supprime ses aides aux citoyens.

Le CdR et des réseaux de collectivités territoriales, comme le CCRE, ont créé l’Alliance sur l’avenir de la politique de cohésion. En quoi consiste cette alliance et quelles sont les prochaines étapes ?

L’objectif de l’Alliance sur l’avenir de la politique de cohésion est de mobiliser tous les leviers politiques, médiatiques et associatifs pour faire pression et convaincre ceux qui doivent décider finalement de l’importance de maintenir et de faire évoluer cette politique. Il ne suffit pas de convaincre le ministre des affaires régionales, il faut aussi voir ce que les ministres des finances se disent à la table des négociations. 

Cette Alliance sera lancée officiellement le 11 octobre, lors de la Semaine européenne des villes et des régions. Pour l’instant nous sommes dans la phase de mise en œuvre. 

Vous avez déjà montré votre volonté de renforcer le travail avec les collectivités et les associations qui les représentent à Bruxelles… 

Il faut trouver les moyens de mieux coopérer, de mieux coordonner les débats. Tout le monde a des moyens limités et je vois beaucoup trop de double et de triple emploi, les mêmes choses qui se font sans coordination ou bien la coordination arrive trop tard. 

Au-delà des dialogues structurels, il faudrait trouver une façon de coopérer et de se mettre plus tôt autour de la table pour mieux orchestrer ce qu’on fait.

La cohésion est un bon moment pour ça, mais il y aura d’autres enjeux tels que le devenir de l’Europe institutionnellement parlant, les capacités d’investissement ou la migration. 

Comment est-ce que le protocole de collaboration récemment signé par le CdR et le CCRE contribuera à atteindre vos objectifs ?

Avec cet accord, nous nous engageons à rejoindre nos forces pour la démocratie locale.

Cette initiative est un plaidoyer pour renforcer les liens entre le CdR et les collectivités territoriales en Europe, au-delà de nos membres, car il y a bien plus de représentants locaux et régionaux que ceux qui sont représentés au CdR. Et là, le rôle des associations est tout à fait fondamental.
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