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Politique de cohésion

Investissements publics locaux - 11.04.2017

Dominique Riquet : « L’UE doit inciter les États à ne pas ajouter de couches administratives ou normatives superflues »
La baisse significative des investissements locaux et régionaux au cours des dernières années est devenue une préoccupation socio-économique majeure. Depuis 2010, on estime que les investissements consacrés aux infrastructures connaissent une baisse dans plus de 40% des collectivités de l’Union européenne. Dans le même temps, 55% des investissements publics en Europe est assuré par les collectivités locales.
 
Afin d’avoir une vision globale de cette problématique, ainsi que de savoir ce que l’Union européenne peut faire pour soutenir les communes et les régions d’Europe, nous avons interviewé Dominique Riquet, député européen et président de l’intergroupe Investissement de long terme et réindustrialisation en Europe.

Vous avez été maire et vous connaissez le local. D’après vous, quels sont les principaux défis auxquels sont confrontées les collectivités ?

Les collectivités territoriales doivent offrir à leurs habitants des prestations de service public attractives ainsi que des solutions adéquates en termes d’emploi et de logement ; et ce dans les meilleures conditions possibles. Or, les territoires doivent le faire dans un contexte de crise qui a des conséquences importantes sur leurs capacités financières, telles que la diminution des recettes directes des collectivités ainsi que la baisse des dotations de l’Etat central. 

Nous pourrions ainsi résumer la situation : de plus en plus de moyens sont nécessaires pour investir avec de moins en moins de ressources disponibles. 

Pour beaucoup de collectivités, l’investissement public est un des moyens de faire face à leurs défis. Dans quelle mesure le manque d’investissement public local peut-il entrer en conflit avec les exigences politiques de l’Union européenne ?

Un très grand nombre des politiques européennes s’articulent sur les trois niveaux de gouvernance : Union européenne, États membres et collectivités territoriales. Or, c’est au niveau local que revient la mise en place de réponses à certains des grands enjeux discutés au niveau européen tels que la mobilité, la protection de l’environnement ou la numérisation. 

Par conséquent, si les compétences des communes et des régions en termes d’ingénierie financière et de suivi de projet ne sont pas au rendez-vous, les politiques initiées au niveau de l’Union européenne n’auront aucun effet sur les territoires. 

Pourriez-vous présenter quelques obstacles, au niveau local et au niveau européen concernant la mise en place de ces investissements ?

Les obstacles à l’investissement s’échelonnent dans le temps. Une commune, après avoir fait ses choix d’investissement, doit connaître les opportunités en matière d’aides disponibles et de co-investissements crédibles. Par la suite, elle doit élaborer des dossiers en concordance avec les exigences des co-investisseurs européens et éventuellement nationaux. Cela implique que l’exécutif local sache répondre à la complexité administrative et technique des dossiers.

D’après vous, que peut faire l’UE pour stimuler l’investissement public local ? 

L’UE pourrait augmenter les sources de financement pour les collectivités territoriales. Simultanément, il paraît indispensable d’alléger les charges administratives et normatives qui conditionnent l’accès aux fonds européens. Un autre aspect crucial pour stimuler l’investissement public local consiste à informer les collectivités des opportunités offertes par les outils financiers européens. L’UE, en collaboration avec les États membres, doit permettre aux collectivités publiques de trouver l’assistance nécessaire au montage des dossiers, comme cela est prévu par exemple dans le cadre du plan Juncker, puis dans leur suivi opérationnel et financier. 

Quelles difficultés peuvent rencontrer les collectivités ?

Une difficulté majeure, souvent rencontrée par les territoires, est le filtre exercé par l’État. Selon la taille du projet, il importe que l’exécutif local puisse soit s’adresser directement à l’échelon européen, en présentant son projet à la Banque Européenne d’Investissement (BEI) par exemple, soit être aidé par la mise en place de plateformes régionales, nationales et même transfrontalières pour lui permettre d’accéder aux financements qui lui font défaut. 

Afin de faciliter le travail des villes et communes d’Europe, l’Union européenne doit par ailleurs inciter les États membres à ne pas ajouter de couches administratives ou normatives superflues. 

Enfin, je voudrais ajouter que, à la différence de l’Etat, les collectivités territoriales n’ont pas la possibilité de présenter des budgets qui ne soient pas à l’équilibre. Comme dans l’élaboration du budget d’un ménage, les investissements publics sont calculés sur la base des recettes et dépenses totales annuelles. Par suite, lorsqu’on regarde le budget des exécutifs locaux, aucune distinction n’est faite entre le financement par l’emprunt des dépenses d’investissement et celui des dépenses de fonctionnement.

Que pouvez-vous faire au sein de l'intergroupe du PE sur l’Investissement à long terme et la réindustrialisation pour soutenir les collectivités dans la mise en place d’investissements ? 

Au sein de l’intergroupe, nous défendons la possibilité pour l’Union européenne de créer des mécanismes de financement permettant de soutenir les investissements dans les projets d’infrastructures.

Parallèlement aux fonds structurels tels que le Fonds européen de développement régional (FEDER) par lesquels l’Union européenne soutient le développement économique dans tous ses États membres conformément aux objectifs de la stratégique Europe 2020, ont été développé des fonds dédiés. 

Pouvez-vous donner un exemple ?

C’est le cas par exemple du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE) qui s’emploie à octroyer un concours financier aux projets présentant un intérêt pour l’Union européenne dans le secteur des infrastructures de transport, des télécommunications et de l’énergie. Il vise à stimuler l’investissement dans les réseaux transeuropéens et à mobiliser les financements provenant des secteurs publics et privés. 

Par ailleurs, nous défendons la mise en place au niveau de l’Union de mécanismes de garantie pour permettre aux porteurs de projets présentant une valeur européenne ajoutée et répondant au principe d’additionnalité (projet non finançable par le marché seul) de bénéficier de conditions d’emprunt plus souples (des taux bas et une garantie de la première perte). C’est le cas notamment de la garantie du Fonds européens pour les investissements stratégiques du plan d’investissement pour l’Europe. Le principe consiste à combiner les subventions de l’Union à des prêts ou des capitaux propres provenant de sources de financement publiques et privées (effet de levier).

Un dernier mot sur le plan Juncker …

Lancé en 2015, le plan Juncker connaît actuellement son premier bilan d’étape. La Commission a proposé de le prolonger au-delà de 2018 et de renforcer son mécanisme en le portant de 16 à 33,5 milliards de garantie (26 de l’UE et 7.5 de la BEI) pour générer 500 milliards d’euros d’investissement au 31 décembre 2020. Dans ce cadre, j’ai suggéré de mettre en place une instance de coordination entre la Commission et la BEI pour optimiser et mieux calibrer les mécanismes de soutien à l’investissement de l’Union européenne. C’est l’idée d’une instance qui mixerait (blending) les subventions européennes (MIE, Horizon 2020, Fonds structurels et d’investissement européens) avec les mécanismes de bonification de la BEI afin de rendre les projets éligibles plus attractifs sur les marchés.  

Contact


Marine Gaudron
Conseillère – Cohésion économique, sociale et territoriale, Finances locales

Email :
Tél : +32 2 213 86 93
Skype : marine.gaudron
Le 8 mars 2017, l’Intergroupe URBAN et l’intergroupe sur l’Investissement à long terme et la réindustrialisation (dont Dominique Riquet est le président) ont tenu un débat conjoint organisé par POLIS et co-organisé par le CCRE et EUROCITIES au Parlement européen à Bruxelles, intitulé « Investissements à long –terme : Obstacles et opportunités pour les gouvernements locaux et régionaux ».
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